7 janvier 1907 - Les Apaches de Ménilmuche

Posted by Jeremy T on

Les Apaches de Ménilmontant

Les Apaches de Ménilmontant

 

"Un gamin de quinze ans, le jeune Albert Zahneller, apprenti mécanicien, demeurant chez ses parents, 4, rue Pierre-Nys, a été, cette nuit, grièvement blessé d'un coup de couteau dans le dos, au moment où, rentrant chez -lui, il passait boulevard de Ménilmontant.

Les auteurs de ce meurtre sont des apaches qui, depuis quelque temps, se livrent dans le quartier à une série d'exploits criminels qui ont complètement terrorisé les habitants. Nous avons pu recueillir, au cours de l'enquête à laquelle nous nous sommes livré sur l'agression dont le jeune Albert ZahneUer a été victime, les renseignements suivants :

Vers minuit et demie, deux gardiens de la paix du onzième arrondissement, qui faisaient une ronde boulevard Ménilmontant, apercevaient, en face du n°125, le corps d'un jeune homme, étendu sur la chaussée. Le malheureux avait reçu entre les deux épaules un coup de couteau et paraissait ne pas donner signe de vie.

Les agents le relevèrent et le transportèrent dans une pharmacie voisine, où l'on s'aperçut que le blessé respirait encore. Des soins lui furent prodigués, et comme son état était excessivement grave, les agents transportèrent le pauvre garçon à l'hôpital Saint-Louis.

C'est  que, ce, matin, M. Hocquet est venu l'interroger. 

Albert Zahnëlier, après avoir fait connaître son identité et son domicile, a fait au commissaire de police le récit de l'agression dont il avait été victime. J'étais allé passer la soirée au théâtre, a-t-il raconté, avec un de mes camarades, et nous-nous étions séparés tous deux à l'entrée du boulevard de Ménilmontant.

Arrivé à la hauteur du numéro 125, je fus arrêté par une bande d'apaches, qui, sans aucun motif, me cherchèrent querelle. Comme je n'ai pas l'habitude d'avoir peur, je répondis aux injures de mes agresseurs sur le même ton, et, ceux-ci me menaçant de me faire mon affaire, je les avertis que s'ils me touchaient je les ferais arrêter.

Je n'avais pas terminé ma phrase que toute la bande se ruait sur moi. Je fus jeté à terre, criblé de coups de poings et de pieds je me défendis de mon mieux, mais l'un des bandits sortit alors son couteau et m'en plongea la lame dans le dos. Je perdis aussitôt connaissance, et, lorsque je suis revendu à moi, je me trouvais, dans cet hôpital.

Après avoir achevé ce récit, la victime, donna, au commissaire de police le signalement de ses agresseurs, en insistant plus particulièrement sur celui de son meurtrier.

D'après l'enquête faite par M. Hocquet, il a été établi que les individus qui se sont rendus coupables de ce meurtre ne sont autres que les apaches de Ménilmontant, dont on possédait déjà le signalement, mais sur lesquels on n'a pu encore mettre la main.

M. Hocquet a demandé au service de la sûreté de mettre à sa disposition plusieurs de ses inspecteurs, et, dès ce matin, plusieurs agents de ce service se sont mis en campagne pour rechercher les coupables. Des battues vont être organisées dans le quartier qui, à la satisfaction des habitants, va être enfin épuré."

JACQUES DELARUE.

 

Journal : La Presse

Directeur de publication : Girardin, Émile de (1806-1881).

Source : Bibliothèque nationale de France